Outlaw’T 1927 by Ed’Big Daddy’Roth
La création de quelconque œuvre fut-elle œuvrette, est invariablement définie comme une folie artistique pour excuser la masse non capable d’y accéder en réalisation ou en interprétation… Platon avait abordé ce sujet, distinguant la “manie divine”, désignée comme productive et la “manie humaine”, résultante de corps et d’âmes malades. De même, Aristote s’est interrogé sur la déraison pour laquelle certains hommes d’exception en art, philosophie, lettres et autres, sont invariablement mélancoliques, son “expressis verbis” étant : “Il n’y a point de génie sans un grain de folie”...
Cette relation a été reprise par des poètes, penseurs et philosophes tels que Shakespeare et Pascal qui souffraient d’hallucinations visuelles. La liste des philosophes et artistes notoires atteints de pathologies psychiques est presque interminable. Chez les philosophes, Socrate passait par des épisodes psychotiques tels l’hallucination. Nietzsche souffrait de la décompensation causée par la syphilis et l’hérédité. Artaud était schizophrène, Alfred de Musset, alcoolique manifestait des troubles bipolaires… et Baudelaire avait une addiction à l’opium.
Chez les musiciens Beethoven était dépressif, Chopin soufrait d’hallucinations et Mozart avait une tendance cyclothymique. Chez les artistes plasticiens la mélancolie a touché Léonard de Vinci, Michel-Ange, Giorgione et le Titien. Gauguin quant à lui est connu pour ses penchants suicidaires, Van Gogh pour sa névropathie, Camille Claudel par sa paranoïa. Munch était craintif, Modigliani mélancolique et la liste se prolonge… Génie et folie se frôlent, la création se mêle à la mélancolie, à la manie, au délire.
Le compositeur français Maurice Ravel atteint d’un trouble neurologique, ne pouvant plus écrire, il construisit alors tout un opéra qui restera enfermé dans sa tête… Diantre, me voilà donc forcé à bousculer les bornes qu’imposent l’anormalité, la folie et l’inhabituel pour parvenir à écrire que le génie est une attitude compliquée dont aucune explication adéquate n’a encore été accordée, le génie étant : “Une personne non ordinaire à caractère propre et distinctif, avec une aptitude particulièrement talentueuse, capable de créer des choses singulières et pionnières”.
Le génie a une aptitude spéciale dépassant la mesure commune, soit dans les lettres et les beaux-arts, soit dans les sciences et la philosophie, voire dans la guerre et/ou la politique etc… Selon Aristote, la créativité serait une aptitude vers la différence : “On n’est soi-même et créateur qu’en tant qu’autre, qu’en se laissant devenir autre”… Je m’étais souvent dit à mon autre moi-même (“Sic semper tyrannis”) que plus la société est productive, plus le génie est effervescent, le génie ne sachant pas lui-même comment les idées naissent en lui alors qu’il ne sait même pas quand et comment il va procéder…
Car la véritable création naît dans l’incompréhensible, rien ne vient de nulle part, tout à une origine, tout prend naissance des conséquences… Bien, j’en termine là et las de l’introduction littéraire de cet article… J’en viens (enfin) à ce Hot Rod des débuts… L’Outlaw est un Hot Rod d’exposition construit, possédé et conçu par Ed Big Daddy Roth, membre des “Maywood Drag-Wagons” de Maywood, en Californie. “The Outlaw” a été la première expérience d’Ed Roth avec la fibre de verre, et cela a commencé comme un dessin de monstre sur le dos d’un sweat-shirt bizarre.
Ed a eu l’idée d’une voiture en fibre de verre après avoir vu une photo d’Henry Ford balançant, d’un pont, un marteau sur une Ford de 1941. La Ford avait un capot en fibre de verre et, selon la légende de la photo, le marteau n’a pas abimé le capot. Cela a époustouflé Roth, et il a pris une note mentale de ce nouveau matériel… Plus tard, il a été initié au mystérieux matériau à la jetée de Huntington Beach où il a vu un surfeur avec une planche de surf en bois recouverte d’un revêtement imperméable en fibre de verre…. Eurekaaaaaaa !
Après cela, Ed a lu l’histoire d’un Hot Rodder nommé W. R. Shadoff dans Life Magazine. Shadoff avait construit un Streamliner Bonneville appelé Shadoff Special, en fibre de verre. C’était en 1957, Ed était intrigué et, en quelques jours, il était occupé à expérimenter de la fibre de verre dans son nouvel atelier au 4616 Slauson Avenue à Maywood. Sa construction était basée sur une Ford Model A de 1929 avec un moteur Cadillac de 1950 qu’Ed avait trouvé dans une casse, qu’il a récupéré/volé et installé entre les longerons de son Streamliner.
Ed a eu du mal à trouver quelqu’un qui pourrait l’aider à construire une carrosserie en fibre de verre pour sa création. Il a donc fabriqué une carrosserie en bois comme ils l’avait fait avec son Shadoff Special, mais c’était trop compliqué, alors Ed a acheté du plâtre et a façonné une carrosserie. Ensuite il bricolé un moule et y a coulé sa fibre de verre en se disant que gagner de l’argent de cette manière n’était pas un problème. Le résultat ressemblait à une sculpture psychédélique loufoque. Selon le livre “Big Daddy Roth – Hot Rod’s” lorsqu’Ed travaillait avec de la fibre de verre, un pantalon durait une journée .
Ses chaussures ont tenu environ quatre jours avant qu’il ne doive les recouvrir d’une couche de peinture noire. Comme personne ne connaissait le matériau à l’époque, Ed ne pouvait demander conseil à personne pendant la construction, et il a dû apprendre de manière empirique jusqu’à ce qu’il finisse par arriver à un résultat “encourageant”. Lorsque la fibre de verre a durci, il a fait tomber le plâtre et cela est devenu le moule du “Outlaw” en quatre parties qui ont été maintenues ensemble par des loquets de boîte à outils. Ed voulait construire et vendre des carrosseries à des clients et concurrencer la Général Motors !
Il visait leur Corvette en “plastique”. Dans son livre “Hot Rods”, Ed Big Daddy Roth, avoue qu’il n’a fabriqué que deux carrosseries. La première a été vendue à des gars d’un club local de Hot Rod’s sans méfiance, dans la rue, payé en cash 229$… tandis que l’autre carrosserie a été utilisé sur le fameux “Outlaw”. Il n’a cependant fabriqué qu’une seule coque de calandre. Dans le “Fawcett How-To-Book” # 427 de 1958, Ed a avoué que c’était une gigantesque pitrerie, mais qu’il a réussi à vendre 9 carrosserie à 229 $. Ed Fuller, qui travaillait pour Roth, a estimé qu’ils avaient fabriqué 12 à 15 carrosseries “hors-la-loi” au total.
Le moule “Outlaw” est resté sur le toit du garage de Roth pendant de nombreuses années. À un moment donné, Roth a demandé à Jim Jake Jacobs s’il voulait le moule car il allait le jeter. Après plusieurs années, Jake a fini par le donner à un nommé Robert Williams. Comme Ed Roth avait peu d’outils lorsqu’il a construit l’Outlaw, il a câblé le circuit électrique avec des câbles récupérés dans des ramassages/vols illégaux sur des chantiers avant de finalement s’enfuir avec une remorque sur laquelle brinqueballait l’Outlaw” jusqu’à chez Clarence Bell qui vivotait dans un garage local
Clarence a soudé les rails d’un châssis bricolé, Ed roth a limé/poncé toutes les marques de soudure avant que l’ensemble du châssis soit envoyé chez “Chrome Nickel Plating” à South Gate pour un chromage. L’essieu arrière, l’arbre de transmission et une transmission Ford de 1939 furent également chromés. Comme le budget avait ainsi pris des proportions disproportionnées pendant la construction, Ed a dû vendre son Hot Rod “Little Jewel” pour payer les chromes sur l’Outlaw. Fritz Voigt, un mécanicien local et acolyte de Mickey Thompson, a aidé Ed pour la construction.
Il a reconstruit le moteur Cadillac et l’a équipé de quatre Stromberg 97 montés sur un collecteur Cragar qui provenaient d’un vol dans l’Utah… Le moteur a ensuite été équipé de caches-soupapes à ailettes Cal Custom payées avec un chèque sans provision volé a une caisse de supermarché… Un carter d’huile chromé et un ensemble de longs collecteurs zoomie sont arrivés comme par magie venant d’un vol à New-York et un essieu avant et des axes d’un Ford V8 de 1937 récupérés un samedi soir durant une nuit glauque dans un garage, ont été installés à l’avant.
Il en fut de même pour quelques coupelles de ressorts hélicoïdaux Chevrolet de 1958. Le reste du train de roulement, à l’exception du ressort transversal arrière du modèle A, provenait d’une Ford de 1948 “découverte” dans un parking… Un boîtier de direction Ford de 1941 de provenance indéterminable a été monté du côté conducteur. La hauteur avant a été conservée d’origine, tandis que l’arrière a été surélevé. Le cadre du pare-brise provenait d’une Dodge de 1922, des feux arrière d’une Chevrolet Bel-Air de 1958 également découverte dans un parking ont été équipées de lentilles Chevrolet de 1956…
Les phares quadruples d’une Rambler de 1959 en attente d’entretien dans l’Iowa ont été installés à l’avant (Les phares étaient montés sous les ailes dans un anneau spécial). La calandre a été fabriquée à partir d’une partie d’une calandre Chevrolet de 1959 qui semblait abandonnée en rue… et un radiateur DKW d’origine douteuse a été installé pour refroidir l’énorme moteur Cadillac. Des Nerf-bars ont été conçues et installées pour créer un look “dragster” et Larry Watson de Watson’s House of Style a peint gratuitement la voiture pour Ed sur une vague promesse d’un retour de commandes.
La carrosserie a été peinte en blanc perle avec des panneaux vert bonbon “embués”. À l’intérieur, Ed a installé un volant Chevrolet Impala de 1958 et sept compteurs Stewart-Warner de provenance indéterminable… L’Outlaw, initialement nommé “Excaliber”, a fait ses débuts au “Disneyland Car Club Day and Autocade Show” le 5 septembre 1959. Le nom “Excaliber” venait d’une épée qu’Ed utilisait comme levier de vitesses. L’épée était un souvenir de la guerre d’indépendance qui provenait de la famille de sa belle-mère. Comme personne ne pouvait prononcer le nom de la voiture, il l’a changée en “Outlaw” en’60.
Au salon Disneyland, le Hot Rod “Excaliber” n’a pas été jugé car l’intérieur n’était pas terminé. Cette version comportait des jantes Mercury chromées aux quatre coins (volées dans le parking d’un motel), des pneus à flancs blancs et un couvre-tonneau cachant que l’intérieur manquait. À l’origine, “Outlaw” était équipé d’un toit papillon en Naugahyde et en aluminium sur un cadre en bois. Canning Hardware avait fourni l’aluminium pour le toit d’une goélette qui a disparu pendant la pause déjeuner…. Plus tard dans les années 1960, alors qu’il remorquait la voiture à travers le Kansas, le toit s’est envolé sur une Cadillac…
Elle était flambant neuve et Ed a préféré ne pas s’en soucier et a décidé de fuir le plus loin possible car retourner et reprendre le toit qui avait été détruit dans le choc aurait amené à ce qu’il doive payer les frais de remise en état de la Cadillac… Le sensationnel Outlaw a fait peu après la couverture du magazine Car Craft en janvier 1960, avec toujours un couvre-tonneau cachant l’intérieur non réalisé et des jantes en acier Mercury aux quatre coins car le proprio des jantes Mercury était passé par hasard et avait récupéré ses jantes volées… 
Quelque temps après le spectacle de Disneyland, Eddie Martinez a tapissé l’intérieur du Hot Rod en naugahyde tuck-n-roll en échange de 4 nuits d’amours avec la copine d’Ed Roth… En juillet 1960, Roth a commencé à remporter trophées après trophées avec son Hot Rod sans que quiconque ne puisse expliquer cet engouement inattendu. Il a même affirmé qu’il était devenu injuste pour lui de concourir avec la voiture, donc après s’être fait remarquer au Oakland Roadster Show 1960 pour avoir utilisé les nouveaux contre-écrous en nylon et ne pas avoir de clés fendues dans les joints à rotule, il a arrêté de concourir.
Il s’est dit que son truc était tellement farfelu qu’il ne pouvait pas être jugé de toute façon, alors il a acheté à crédit un camion d’exposition ambulant qui servait de stand de vente de t-shirts à Dick Cook qui avait installé un V8 Oldsmobile Tri-power dans la voiture, et selon Ed, c’était la voiture de remorquage parfaite. Il a donc tout fait pour obtenir la remorque “keep it simple” construite par le père de Ron Aguirre et s’est relancé dans les expositions en embarquant son Hot Rod sur la remorque…Du 4 au 6 mars 1960, l’Outlaw a été présenté au Kustom Kar Kapades à Monterey, en Californie et là, la chance…
La chance miraculeuse est intervenue directement venue du ciel car les gens de la “Revell Model Company” ont demandé à Ed Roth s’ils pouvaient fabriquer et vendre une maquette 1/8ième du Outlaw… Ed était ravi et a accepté l’offre. Lorsque Revell a commencé à fabriquer puis diffuser le kit de modélisme, il ont vendu 100.000 kits, donc Henry Blankfort a appelé Ed dans son bureau et lui a dit que Revell avait besoin d’un coup de pouce pour les kits. Ed a accepté et a dit à Henry qu’on l’avait toujours appelé “Big Ed” à Bell High… Revell a suggéré qu’il devrait suivre le mouvement et s’appeler quelque chose comme “Spider”.
Cela n’a pas plu à Ed, mais comme à la même époque, il y avait un mouvement hippie à Los Angeles où les gars se laissaient pousser la barbe et récitaient de la poésie, les “Muffin’s” à la tête de ces folies étaient surnommés “Big Daddy”. Henry Blankfort a décidé de remplacer “Big Ed” par “Big Daddy”...Ed s’est dit que puisqu’il avait 5 enfants à la maison et qu’il était grand temps de se calmer, le nom lui irait bien. Il s’est mis d’accord et les deux parties furent heureuses et firent beaucoup de kits à monter, tous conçus par Jim Keeler, qui était chargé du travail de conception sur plusieurs autres kits de modèles Roth… 
En 1961, Bob Larivee, Sr. a conclu un accord avec Ed Roth pour ramener les Hot Rodder’s hors-la-loi à un tas de spectacles pour “faire un max de dollars”... Alors, Bob a conclu un accord avec Ed pour lui vendre l’Outlaw 3.250 $. Ed a vu l’accord comme une occasion de financer une autre construction : la “Beatnik Bandit” qui une fois terminé a fait place au “Mysterion”, Les deux voitures ont été de grands succès. Après une vie difficile dans le show-biz, l’Outlaw a été peinte dans un flocon de métal vert par Dirty Doug. En 1970, Ed a vendu l’Outlaw à Jim Brucker pour 50 $. Jim l’a remis à neuf et l’a vendu 5.000$ à Harrah…
Ed et Revell se sont brouillés, soi-disant à cause de l’implication d’Ed avec les Hell’s Angels, alors les gens de Revell ont réédité l’Outlaw sous le nom de “Canned Heat” en 1973 sans aucune mention d’Ed Roth qui en est mort de chagrin… En 2002, Robert et Suzanne Williams, qui possédaient le moule original pour l’Outlaw, ont proposé aux membres du domaine Roth, en collaboration avec Rat Fink.Org et Kustom Art Studios, d’utiliser le moule original d’Ed Roth pour une série de carrosseries nouvellement produites qui allaient être fabriquées, le produit de la vente allant au domaine Roth.
Comme ils ne voulaient pas stresser le moule d’origine, Jimmy a réparé le moule d’origine, en a sorti un mâle avant de tirer un moule femelle pour la production. Le coût d’une carrosserie était de 3.700 $, tandis que l’embout “nasal” était vendu 1.260 $. Tous les composants étant numérotés et livrés avec un certificat d’authenticité. L’un des premiers kits de carrosserie de deuxième génération a été vendu à Mark Morarity qui a cloné l’Outlaw. et un autre clone d’Outlaw a été construit par Fritz Schenck…
C’est une histoire sans fin… Maintenant que Ed Roth est décédé des suites d’une vie trop mouvementée entrecoupée de fait non divulgables pour ne pas choquer l’opinion publique concernant l’honnêteté proverbiale des Américains, c’est le Musée Petersen (lui aussi issu d’une histoire aventureuse consistant à s’être emparé du magazine Throttle pour en faire Hot Rod Magazine), qui détient le Outlaw d’Ed Roth qui, étant décédé, ne sait plus revenir réclamer quoi que ce soit… L’affaire est donc finie, bouclée et tout le monde s’en tape mes coucougnettes en hurlant : “Encore plus, encore plus”…












































