Ford Escort StreetMachine V8 Blower 600cv
Faites pareil que cette Ford Escort MK1 en Franchouille, voire en Belgitude et vous serez publiĂ© dans ChromesFlammes/GatsbyOnline… Pareil signifie une petite berline 2 portes datant de fin des annĂ©es soixantes, remotorisĂ©e d’un small bloc V8 suralimentĂ© via un Blower/Compresseur… L’invitation concerne aussi la fumeuse Simca Aronde Baveuse 4 cylindres de Fufu qui ont migrĂ©s tous les deux aux USA il y aura bientĂ´t 40 ans… Quoique pire que la Ford Escort MK1, la Simca Aronde Ă©tait Ă©galement sans grande personnalitĂ© dans le civil, quoique la Ford Escort possĂ©dait un meilleur tempĂ©rament que la Simca n’avait pas, dès qu’elle se dĂ©guisait en voiture de courses/Rallyes. Bonus si vous ĂŞtes cinĂ©phile et pas uniquement amateur de films “arts et essais”, une Ford Escort similaire a Ă©tĂ© une star de “Fast and Furious” ! C’était la bagnole de Paul Walker dans le 6e opus de la sĂ©rie. Elle Ă©tait d’une couleur bleu roi, avec des bandes “racing” blanches (bof !), des jantes en 13″ dorĂ©es (béééérk !) et des extensions d’ailes (100 ringard !)…. La Simca Aronde n’ayant pas voix au chapitre dĂ©classĂ©e pour cause de non-envoi participatif au concours (Gagnez des chewing-gum’s), restons sur la Ford Escort Mark qui a dĂ©butĂ© sa carrière fin 1967. FabriquĂ©e Ă l’usine Ford d’Halewood en Angleterre et faisant ses dĂ©buts publics officiels au salon de l’automobile de Bruxelles de janvier 1968, la p’tite salope remplaçait l’Anglia qui Ă©tait plus caractĂ©ristique avec sa vitre arrière inclinĂ©e Ă l’envers.
L’Escort ne disposait pas mĂŞme d’un tel gag stylistique, elle ne disposait de rien de sexy, Ă©tait de formes quelconques, dĂ©modĂ©e avant l’heure et 100% banale. C’Ă©tait l’Ă©poque des productions de masse et l’usine Ford de Genk (Belgique) qui a embrayĂ© en 1968, a permis de doubler les chiffres de production Ă partir de septembre, faisant tout profit sans modifications dans la chaine d’assemblage, pour satisfaire les marchĂ©s Ă conduite Ă gauche. Toutefois ces Escort continentales diffĂ©raient lĂ©gèrement des Escort’s construites au Royaume-Uni concernant la suspension avant et le boĂ®tier de direction qui Ă©taient configurĂ©s diffĂ©remment alors que les freins Ă©taient Ă©quipĂ©s de doubles circuits hydrauliques. DĂ©but 1970, la production des modèles d’Europe continentale sera transfĂ©rĂ©e dans une nouvelle usine en bordure de Saarlouis, en Allemagne de l’Ouest, l’usine belge revenant aux Ford Transit… MalgrĂ© sa banale laideur, l’Escort a Ă©tĂ© un succès commercial dans plusieurs pays d’Europe occidentale, mais nulle part ailleurs plus qu’au Royaume-Uni ou tout ce qui est laid et sclĂ©rosĂ© d’avance, devient miraculeusement best-seller national… Par exemple, dans les annĂ©es 1960, l’Austin/Morris 1100 de BMC commençait Ă montrer son âge, tandis que la Ford Cortina avait grandi, Ă la fois en dimensions et en prix, au-delĂ du crĂ©neau de marchĂ© populaire vers lequel elle avait Ă©tĂ© initialement lancĂ©e. Elle concurrençait la Vauxhall Viva (affreuse !) et, Ă partir du dĂ©but des annĂ©es 1970, l’Hillman Avenger du groupe Rootes (pire !).
En juin 1974, six ans après l’introduction de la voiture au Royaume-Uni, Ford a annoncĂ© la production de la deux millionième Ford Escort, un chiffre jusqu’alors inĂ©galĂ© par aucun modèle Ford en dehors des États-Unis. Ford a Ă©galement dĂ©clarĂ© que 60 % des deux millions d’Escort avaient Ă©tĂ© construites en Grande-Bretagne… Mais,1974 a simultanĂ©ment sonnĂ© le glas de la fin de production de l’Escort Mark I. L’explication Ă©tait que l’Escort non seulement semblait devenir de plus en plus moche au fur et Ă mesure que sortaient des concurrentes, mais son Ă©troitesse et son inconfortable ne pouvait rivaliser avec la nouvelle Opel Kadett vendue Ă un prix comparablement moins Ă©levĂ©. L’Escort Ă©tait, de plus, techniquement archaĂŻque par rapport aux Fiat 128, Alfa Romeo Alfasud et Renault 12, qui connaissaient un Ă©norme succès. L’Escort Mark I prĂ©sentait pourtant des Ă©lĂ©ments de style contemporains en phase avec son temps : une ceinture de caisse de style “bouteille de Coca-Cola” mal inspirĂ©e mais imposĂ©e par Detroit… et une calandre en forme d’os de chien (la principale caractĂ©ristique stylistique de la voiture). Initialement, l’Escort Ă©tait vendue en tant que berline deux portes avec des phares avant ronds et un revĂŞtement de sol en caoutchouc sur le modèle DeLuxe. Le modèle Super comportait des phares rectangulaires, des tapis, un allume-cigare et une jauge de tempĂ©rature d’eau. Sous le capot on trouvait le moteur Kent Crossflow Ă©galement utilisĂ© dans la Ford Pinto nord-amĂ©ricaine.
Une version plus performante pour les rallyes et les courses Ă©tait disponible : l’Escort Twin Cam, conçue pour le rallye international du groupe 2. Elle avait un moteur avec une double tĂŞte d’arbre Ă cames Ă huit soupapes fabriquĂ©e par Lotus, montĂ©e sur le bloc 1L5 (sans flux croisĂ©), qui avait un alĂ©sage plus grand que d’habitude pour donner une capacitĂ© de 1.558 cc. Ce moteur avait Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ© Ă l’origine pour la Lotus Elan. La production de la Twin Cam, qui Ă©tait produite Ă Halewood a Ă©tĂ© progressivement abandonnĂ©e lorsque la production de la RS1600 (RS = Rallye Sport) Ă moteur Cosworth a dĂ©butĂ©. L’Ă©dition la plus cĂ©lèbre de la Twin Cam a Ă©tĂ© conduite pour le compte de Ford par Alan Mann Racing dans le championnat britannique des berlines en 1968 et 1969, arborant un moteur FVC 16 soupapes complet de Formule 2 de Ford produisant plus de 200cv. L’Escort, conduite par le pilote australien Frank Gardner a confortablement remportĂ©e le championnat de 1968. L’Ă©quipe de l’usine Ford Ă©tait pratiquement imbattable Ă la fin des annĂ©es 1960 et au dĂ©but des annĂ©es 1970, et la plus grande victoire de l’Escort a sans doute Ă©tĂ© lors du rallye de la Coupe du monde de Londres au Mexique en 1970, conduite par la lĂ©gende finlandaise Hannu Mikkola et le copilote suĂ©dois Gunnar Palm. Cela a donnĂ© naissance aux versions en Ă©dition spĂ©ciale pour la route, l’Escort Mexico (moteur “Crossflow” de 1 598 cm3) en l’honneur de la voiture de rallye introduite en novembre 1970.
10.352 Mexico Mark I ont Ă©tĂ© construites Ă l’aide de carrosseries utilisant des panneaux de renforcement supplĂ©mentaires dans les zones Ă forte tension, ce qui les rendait plus adaptĂ©es Ă la compĂ©tition. En plus de la Mexico, la RS.1600 a Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ©e avec un moteur Cosworth BDA de 1.601cc qui utilisait un bloc Crossflow avec une culasse Cosworth Ă 16 soupapes, baptisĂ©e “Belt Drive A Series”. La Mexico et la RS.1600 Ă©taient construites dans les installations Advanced Vehicle Operations (AVO) de Ford situĂ©es Ă l’usine d’Aveley dans le sud de l’Essex. En plus des moteurs et des suspensions sport plus performants, ces modèles comportaient une carrosserie renforcĂ©e comme la Mexico. Ford a Ă©galement produit un modèle RS.2000 comme alternative Ă la RS.1600 quelque peu capricieuse, dotĂ©e d’un moteur Pinto (OHC) de 2,0 L. Cela a Ă©galement permis de remporter des victoires en rallye et en course et a devancĂ© le marchĂ© des berlines sportives, Ă©tant une voiture de route de performance souhaitable mais abordable. Comme la Mexico et la RS1600, cette voiture a Ă©tĂ© produite Ă l’usine d’Aveley en utilisant la carrosserie renforcĂ©e… La Ford escort MkI Ă©tait construite en Allemagne et en Grande-Bretagne et Ă©galement construite en Nouvelle-ZĂ©lande et en Australie… Les gĂ©nĂ©rations suivantes de l’Escort devaient continuer le mythe (sic !)… La MKII a essayĂ© de reconquĂ©rir une partie du terrain abandonnĂ© par l’escort MKI, sans grands rĂ©sultats.
L’Escort MKII Ă©tait toujours basique avec une propulsion archi conventionnelle, un pont rigide et une boĂ®te de vitesses manuelle Ă quatre rapports, ou une transmission automatique Ă trois vitesses… Pffffffffff !  VoilĂ , voilou, les prĂ©sentations Ă©tant faites, je me lance dans la prĂ©sentation de la bĂŞte vedette de cet article, car surmotorisĂ©e d’un V8 Ă©quipĂ© d’un compresseur (Blower)… Tout d’abord, abordons l’élĂ©phant dans la pièce… Pourquoi y a-t-il un V8 Holden “deux-billets-trois” dans ce produit Ford ? Il y a eu beaucoup de discussions sur les rĂ©seaux asociaux, il est donc prĂ©fĂ©rable de se dĂ©barrasser des questions dĂ©rangeantes… “Cette Escort est configurĂ©e avec des ressorts hĂ©licoĂŻdaux tout autour, car elle ne sera pas un grĂ©ement d’épuisement. Nous l’utiliserons peut-ĂŞtre un jour pour des sprints ou des courses de dragsters”, m’a expliquĂ© sa propriĂ©taire et conceptrice Shannon, ajoutant : “J’avais un V8 253ci Holden de 350cv Flathead en alliage qui traĂ®nait, je me suis dit que ce serait cool de le placer dans l’Escort avec une boĂ®te Ă cinq vitesses. Je suis tombĂ©e en amour, vraiment, pour cette Escort” … Shannon Heraud, est la jeune femme propriĂ©taire de cette Escort peu commune qui a attirĂ© de grandes foules Ă l’Australian Meguiar’s Motor. Après une razzia chez United Diesel Nissan, Shannon qui voulait ĂŞtre la championne des burnouts Australiens avec les meilleurs d’entre eux, s’est vue adulĂ©e dans l’ensemble de l’Australie, pays de naissance de Mel Gibson et du premier Mad Max qui a inspirĂ© Shannon Herraud pour construire cette Street Machine :
“Elle a toujours bien fonctionnĂ© et les gens l’ont aimĂ© de suite la surnommant “Thongslapper”, alors j’ai continuĂ© Ă fond les mannettes”… Shannon n’a jamais Ă©tĂ© tentĂ©e d’y mettre une V8 Corvette LS idĂ©al pour les burn-out, c’Ă©tait trop Ă©vident, donc trop facile, bien que son frère Brian s’est reconstruit une Toyota Celica TA22 orange qui roule avec un V8 LS. Il m’a dit : “Ça s’appelle SOLD OUT parce que j’y ai mis un LS1 et je l’ai vendu illico-presto. Il a une puissance similaire Ă celle du 253, mais ce n’est tout simplement pas la mĂŞme chose”… En fait, presque rien sur cette Escort n’est conforme aux normes actuelles, et c’est exactement comme ça que Shannon l’aime :“Nous voulions quelque chose de totalement diffĂ©rent, construit selon nos goĂ»ts tout en essayant de garder un budget serrĂ©”… Shannon a abaissĂ© la crĂ©maillère sur la traverse pour assurer de l’espace pour les conduites de carter sec et pour que le moteur soit aussi bas que possible. Le refroidissement est primordial dans une voiture en burnout, mais le radiateur est entièrement contenu derrière la calandre “en os de chien” de l’Escort, avec quelques trous supplĂ©mentaires dans la jupe pour faire bonne mesure. L’attention portĂ©e aux dĂ©tails par Shannon lui a permis, non seulement de crĂ©er un ensemble de collecteurs d’Ă©chappement, mais aussi de les faire passer par des canaux très personnalisĂ©s dans le châssis… Forger son propre chemin aboutit rarement Ă un projet bon marchĂ©, mais Shannon et son partenaire Brian ont gardĂ© la construction gĂ©rable en rĂ©alisant presque tout en interne.
“La seule fois oĂą l’Escort est sortie de mon box, c’était pour aller chez Burke’s Bodyworks pour quelques dernières retouches de carrosserie, puis pour peindre “, dit-elle avec une fiertĂ© justifiĂ©e. “Tout le reste du travail a Ă©tĂ© effectuĂ© at-home”…Shannon a achetĂ© l’Escort avant que les prix ne deviennent fous, de sorte que la carapace incomplète n’était que de 500 $. Dès que l’Escort fut installĂ©e dans son box/atelier, Elle et Brian se mirent Ă l’œuvre, en commençant par les passages de roues uniques en forme de bulle. La pompe et le profil Ă©taient Ă peu près tels que Ford l’avait prĂ©vu pour sa RS1600 spĂ©ciale de course, avec des rĂ©pliques en fibre de verre Ă l’avant et des reproductions en mĂ©tal Ă l’arrière, toutes deux fabriquĂ©es au Royaume-Uni d’Angleterre…“Il a suffit de les souder et c’était parti”, dit Shannon, elle est assez habile dans tous les domaines, allant jusqu’à acheter une cintreuse et Ă s’amuser Ă construire la cage de sĂ©curitĂ© elle-mĂŞme. Puis elle a peaufinĂ© la voiture, les panneaux de coffre, le tableau de bord de style RS1600 et les jauges Auto Meter, tandis que les garnitures de porte, le dessus du tableau de bord et la garniture de toit ont Ă©tĂ© fabriquĂ©s chez Terry’s Motor Trim. Shannon et Brian ont entrepris de crĂ©er quelque chose de complètement unique en termes d’apparence, d’attitude et de motivation, mais n’auraient jamais pensĂ© attirer autant d’attention. Avec la foule du MotorEx, le couple ont appris que lorsque vous placez un chat Holden parmi les pigeons Ford, les gens vont s’arrĂŞter et regarder.
Le drag racing nostalgique est un sport et un passe-temps consistant Ă reprendre des technologies du vingtième siècle et Ă les exploiter Ă leur maximum absolu. Dans les courses de dragsters professionnelles contemporaines, oĂą les technologies de la vitesse ont Ă©tĂ© affinĂ©es jusqu’à atteindre un niveau de performance Ă©levĂ©, la vitesse est un facteur dĂ©terminant. Au point de fuite unique, les voitures se ressemblent maintenant toutes. Aux niveaux supĂ©rieurs, ce sport est un sport de business d’entreprises, il n’existe aux USA tout comme en Australie, qu’une seule façon d’aller de A Ă B… C’est en dĂ©ployant la gosse artillerie, de l’argent, des ordinateurs, des matĂ©riaux ultramodernes, de la physique, des carburants et une Ă©quipe de gars qui ne sont pas des “bras-cassĂ©s”.... Mais il fut un temps oĂą il existait une centaine d’autres façons d’aller de A Ă B. Il y avait des dragsters Ă trois roues, des dragsters Ă deux et quatre moteurs. L’histoire de la vitesse en ligne droite sur une piste a Ă©tĂ©, jusqu’à rĂ©cemment, une contre-culture extrĂŞme de personnes tentant des expĂ©riences audacieuses et folles pour dĂ©naturer et renaturer les machines. Les courses “Nostalgia” cĂ©lèbrent cette histoire en la faisant revivre. Les dragsters vintage nostalgique ne sont pas des pièces de musĂ©e, des spectacles morts de l’âge d’or en chrome et en Ă©cailles de sucre. Au contraire, ils sont pilotĂ©s, dĂ©montĂ©s, reconstruits et pilotĂ©s Ă nouveau. C’est Ă Famoso aux USA que l’aperçu de tout cela est le plus instructif,.
C’est une piste historique nichĂ©e au milieu de vergers d’amandiers au nord de Bakersfield, en Californie, oĂą la foule regarde les roues motrices des dragsters labourer le tarmac avec une telle force qu’elles le font fondre. Il faut s’imprĂ©gner de l’ambiance de l’endroit, du populaire mĂŞlĂ© Ă une violence stupĂ©fiante des moteurs. Chaleur, mĂ©tal et bruit… En juin au “National Hot Rod Association’s Nostalgia Nationals” puis au “Beech Bend Raceway” Ă Bowling Green, Kentucky, le temps est toujours brutal, et il le reste, ensoleillĂ© et 45°, avec une humiditĂ© flĂ©trissante… Il y a tant de voitures Ă admirer, de courses Ă regarder et de gens Ă rencontrer que tout devient folie. L’indispensable est d’avoir des bouteilles d’eau fraĂ®che, une casquette de base-ball “Vive TRUMP” et des lunettes de soleil, ainsi que des cache-oreilles de protection. AccoutrĂ© de la sorte, je n’ai pu m’empĂŞcher de poser une question-con Ă force de voir les prĂ©posĂ©s aux carburants, fumer pire que des Turcs : “Je pourrais donc laisser tomber une cigarette allumĂ©e dans un bidon d’essence”, ai-je osĂ© dire “et elle s’éteindrait tout simplement ?”… En disant cela, j’ai imaginĂ© un bidon d’essence, rouge, bien sĂ»r (on les appelle des bidons mais ils sont en plastique, comme ceux qu’on laisse ici et lĂ , dans le garage, la cave, la remise Ă outils)… J’avais senti une odeur fantĂ´me d’essence provenant de ces contenants, mais on m’a dit qu’on ne sentait rien et que mĂŞme si c’était le cas, cela ne dĂ©rangerait pas, car la cigarette s’éteindrait, l’essence qui est un gaz liquide ne s’enflammant pas…
“En tant que règle, Pat, les liquides eux-mêmes ne brûlent pas. Ce sont leurs vapeurs qui brûlent”… Le pétrole et ses propriétés sont ainsi devenus l’un de mes centres d’intérêt… Qui s’efforcerait de rester ignorant face à un exposé instructif sur le pétrole ? Pour comprendre ce qui se passe sur une piste de dragster, ce que vous y entendez et y voyez, il est nécessaire de comprendre certaines propriétés de base des distillats de pétrole. On m’a fait comprendre à quel point il était étrange et incroyable que le nitrométhane, brûlé par les funny cars et les dragsters Top Fuel (les deux catégories de véhicules les plus rapides), ne soit pas un combustible fossile traditionnel mais un “monopropellant” fabriqué industriellement qui est hautement explosif, du fait qu’il contient son propre oxygène. Lorsqu’il est brûlé dans un moteur, il peut produire dix à vingt fois plus d’énergie que le gaz naturel et que la quantité équivalente d’essence. C’est produit en combinant du propane et de l’acide nitrique et c’est utilisé dans les solvants de nettoyage à sec. Personne ne sait quand, exactement, le premier fou courageux a alimenté un moteur à combustion interne avec ce mélange imprévisible. Les nazis ont apparemment subventionné son utilisation par le biais de Ferdinand Porsche dans les années’30, pour les courses de vitesse sur terre et les Grands Prix. Ignorant cette histoire, le pilote et innovateur du Hot Rodding Vic Edelbrock a réinventé la technologie en 1949, quand il l’a versé dans un V-8 Ford Flathead et qu’il a été propulsé vers les étoiles…
Le nitromĂ©thane a fait fondre les bougies d’allumage et dĂ©truit le moteur. Une fois qu’Edelbrock eut compris comment modifier son moteur, il a commençé Ă l’utiliser en secret pour gagner des courses, en la mĂ©langeant Ă de l’huile d’orange pour masquer son odeur. Les Ă©normes flammes jaunes qui jaillissaient des Ă©chappements de son dragster ont attirĂ© l’attention des concurrents sur le fait qu’il faisait quelque chose de diffĂ©rent, et la nouvelle s’est rapidement rĂ©pandue. Après que Timothy McVeigh se soit fait passer pour un passionnĂ© et ait achetĂ© trois fĂ»ts de nitromĂ©thane lors d’une course de la NHRA au Texas (un ingrĂ©dient de la bombe qu’il a utilisĂ©e pour faire exploser le bâtiment fĂ©dĂ©ral d’Oklahoma City en 1995) le ministère de la sĂ©curitĂ© intĂ©rieure a commencĂ© Ă superviser l’utilisation du nitromĂ©thane lors des courses. La NHRA a Ă©galement renforcĂ© ses rĂ©glementations, avec des barrières de sĂ©curitĂ© et des barrières anti-bĂ©lier autour des fĂ»ts de carburant (les chocs physiques peuvent faire exploser le produit). Ă€ la fin de chaque Ă©vĂ©nement nostalgique, une dĂ©charge clĂ´turĂ©e devait ĂŞtre mise en place au milieu des tonneaux bleus vides de 50 gallons, qui tĂ©moignent des quantitĂ©s utilisĂ©es que les coureurs ont injectĂ©s dans leurs moteurs. Faire tourner un moteur au nitromĂ©thane est très risquĂ©, mais très payant, quoique des problèmes mĂ©caniques peuvent, dans ce cas, entraĂ®ner une calamitĂ©, par exemple si le nitromĂ©thane entre dans la chambre de combustion et ne s’enflamme pas…
Le carburant liquide n’a pas d’endroit où aller et le moteur explose, projetant comme des éclats d’obus et engloutissant le dragster et son conducteur dans les flammes. La catastrophe prend de nombreuses formes et les fans ne sont pas toujours à l’abri. J’avais entendu parler d’un carter cassé qui s’était envolé dans une tribune à Famoso et avait blessé un spectateur qui avait néanmoins demandé au pilote d’autographier le morceau de métal qui l’avait touché. Il y a eu d’autres accidents bien plus graves. Les dragsters à moteur avant ont l’essieu différentiel arrière qui se trouve juste entre les jambes du conducteur. Si les engrenages se brisent, ils peuvent trancher tout ce qui se trouve au milieu d’eux. Des rumeurs font état de conducteurs castrés de cette manière… Brrrrrr ! Brrrrrrrrrrrr ! Lorsque la transmission de la légende de la course automobile “Big Daddy Don Garlits” a explosé en 1970, il a été plus chanceux et n’a perdu que la partie avant de son pied droit. Mais le carter du moteur a volé dans les tribunes et a sectionné le bras d’un adolescent. Le garçon et Garlits ont été emmenés dans le même hôpital. Un médecin qui avait été envoyé par avion pour essayer de rattacher le pied a décidé, avec les encouragements de Garlits, de se concentrer sur l’enfant, dont le bras a été rattaché avec succès. L’année suivante, il a travaillé avec l’équipe de Garlits lors du même événement. À la suite de sa blessure et du décès de tant de pilotes dans des accidents comme le sien, Garlits a créé le dragster à moteur arrière.
Nombreux étaient ceux qui pensaient qu’une conception aussi farfelue échouerait, mais aujourd’hui, cette configuration est devenue la norme et les dragster à moteur avant, malgré toute leur bravoure, sont complètement obsolètes, sauf dans les événements nostalgiques. L’embrayage doit être démonté après chaque utilisation : après seulement quelques secondes, les disques d’embrayage deviennent si chauds qu’ils peuvent fusionner. Les moteurs Top Fuel s’usent tellement en une seule course qu’ils doivent être entièrement démontés et reconstruits après chaque passage sur la piste d’un quart de mile. Peut-être que les graves conséquences d’une erreur réduisent le champ des candidats à la course nostalgique à ceux qui maîtrisent leur sujet. Les courses exigent de la maîtrise. La demande est pure : il n’y a plus d’argent à y gagner, seulement le plaisir et la gloire, mais en filigrane se cache une pulsion, un impératif ontologique, peut-être, de jouer avec le feu. Je ne sais plus ce qu’il en fut vraiment, mais je me suis laissé manœuvrer pour réaliser un vrai 400 mètres (quart de mile) dans un antique Dragster Nostalgia avec le moteur devant le pilote… On m’a décrit les protocoles de sécurité et on m’a montré ce que je devais porter : une veste et un pantalon, une cagoule et un respirateur, des lunettes, un casque, des gants et des bottes, le tout ignifugé. On m’a assuré que les secours seraient à proximité avec un gros extincteur prêt à l’emploi.
Estimant que je pouvais changer d’avis, on m’a direct attifé de la tenue complète y ajoutant une conversation animée sur les raisons pour lesquelles le nitrométhane est plus dense que le méthanol. On est tombé d’accord : le nitrométhane est une molécule plus lourde que le méthanol. En attendant, la veste de pompier, d’un blanc satiné jauni par le temps, avec le nom d’un intrépide oublié depuis longtemps brodé en bleu sur la poitrine, me convenait parfaitement. Les tribunes, qui bordent les deux côtés de l’hippodrome, étaient pleines lorsque notre cortège s’est engagé sur la piste. Les semelles de mes chaussures s’accrochaient à la surface collante tandis que nous descendions la piste vers notre emplacement désigné, parmi deux longues rangées de voitures. Le dragster avait besoin d’une certaine distance par rapport aux autres véhicules parce que ses orifices d’échappement étaient orientés vers l’extérieur, plutôt que vers le haut et l’arrière, et qu’il ne fallait pas brûler accidentellement quelqu’un qui se trouvait à proximité. J’ai refermé la veste, enfilé les bottes argentées et le reste. Je me sentais comme un astronaute, mais plus en sueur. Click click et l’enfer s’est ouvert en grand…Le feu a jaillit des collecteurs. J’ai appuyé un chouia sur l’accélérateur. Le bruit était une sensation extrême, multidimensionnelle. Mes cellules s’agitaient : “Comment quelqu’un peut-il conduire cela ?” me suis-je dit. “Comment ai-je pu volontairement appuyer sur l’accélérateur et faire en sorte que cela se produise ?”…
A la fin du run, avec parachute et secousses, j’en suis sorti vivant et j’ai enlevĂ© les lunettes, le casque et le masque anti-incendie. En sueur, hĂ©bĂ©tĂ© et triomphant, mĂŞme si ce n’est que d’une façon mineure, j’avais rĂ©duit la distance entre moi et les gens qui conduisent ces monstres, j’ai posĂ© pour des photos. La piste Ă©tait maintenant ouverte. Mes fans (de Pretty Car aux USA) pouvaient descendre des tribunes et venir me quĂ©mander un autographe… Tout en parlant Ă divers spectateurs, j’ai vu deux beautĂ©s s’amuser, pieds nus, Ă tester l’adhĂ©rence de la piste, Ă rire, Ă trĂ©bucher, Ă tomber, Ă frotter leurs talons sur la surface gluante, ce qui a dĂ©posĂ© une crasse noirâtre sur leurs pieds et leurs jambes. Sans jugement. C’était juste une image. Des filles aux pieds nus devant un dragster… Pieds plus monde. Piste plus chaleur. Mains plus outils. Carburant et dĂ©tonations. Vitesse. Possession. J’avais le tournis… Je suis allĂ© dormir… Les gars qui se trouvent sur le circuit de dragster avec de superbes Hot Rods et qui voyagent en solo “vivent le rĂŞve”, mais semblent un peu dĂ©laissĂ©s. Au sommet de la hiĂ©rarchie olfactive se trouve l’odeur du Sunoco 110 brĂ»lĂ©, un gaz de course plombĂ© Ă indice d’octane Ă©levĂ© qui embaume les voies de ravitaillement lorsque les classes les plus compĂ©titives s’alignent. Beaucoup de fous aiment l’odeur de l’essence-course, qui a un parfum remarquablement doux. Cette douceur est due Ă sa teneur en benzène et Ă divers additifs…
Le benzène est un agent cancĂ©rigène connu, ce qui ne vient jamais Ă l’esprit des gens qui parcourent avec enthousiasme les pistes lors d’évĂ©nements nostalgiques, en regardant les pilotes dans des Hot Rods grondants avec des compresseurs chromĂ©s percĂ©s dans le capot se diriger vers le dĂ©part. Pffffff !  “Ah, l’essence de course”… Quant Ă l’E85, un mĂ©lange d’éthanol et d’essence, il sent “le vieux vin et les chaussettes mortes”… L’E85 peut ĂŞtre achetĂ© dans certaines stations-service, il est gĂ©nĂ©ralement utilisĂ© par les vrais “sportifs”, ceux qui n’ont pas de sponsors ni de remorques coĂ»teuses, qui conduisent leurs voitures turbocompressĂ©es sur le circuit de dragster dans la tradition du “Run what ya brung” (faites ce que vous avez Ă faire). Le nitromĂ©thane est considĂ©rĂ© comme le carburant le plus violent des voitures les plus rapides, avec une odeur unique que tout le monde peut reconnaĂ®tre une fois qu’il y a Ă©tĂ© initiĂ©. Pour moi, c’est une odeur vaguement acide et lĂ©gèrement fermentĂ©e, mais agressivement chimique, comme la bière plate et l’engrais industriel (mais pas nĂ©cessairement dans le mauvais sens du terme). De nombreux amateurs de courses de dragsters affirment adorer son odeur, mĂŞme si elle peut piquer les yeux comme du gaz lacrymogène si on s’en approche. Une bouffĂ©e de ses vapeurs peut faire perdre connaissance, c’est pourquoi les pilotes portent des masques Ă gaz. C’était le troisième et dernier jour des Nostalgia Nationals, et une grande foule s’était amassĂ©e derrière l’aire de transit…
C’Ă©tait pour ĂŞtre au plus près de l’action. Un très vieil homme en fauteuil roulant motorisĂ©, contournant les panneaux avertissant les spectateurs de rester en dehors de la zone de dĂ©part, a roulĂ© vers moi comme si ma place Ă l’ombre lui appartenait. Je l’ai cĂ©dĂ©e. Il y a beaucoup de ces personnes âgĂ©es dans les Ă©vĂ©nements de dragster nostalgiques Ă mobilitĂ© rĂ©duite, patinĂ©es par le soleil jusqu’à l’âge de la retraite du ravage absolu, parfois en tractant un char d’assaut oxygĂ©nĂ©. On ne peut ignorer le dĂ©clin corporel de nombreux passionnĂ©s, et pourtant je ne suis pas convaincu qu’il signe la fin. Au contraire, la scène nostalgique semble curieusement tournĂ©e vers l’avenir, mĂŞme s’il est contre-intuitif de dĂ©clarer que le passĂ© ressemble Ă l’avenir. Le style rĂ©tro m’a toujours dĂ©primĂ©, me paraissant n’être rien d’autre que la nostalgie d’une innocence qui n’a jamais existĂ©. Les gens qui participent Ă des courses de voitures nostalgiques jouent les mĂŞmes vieux tubes que ceux qui sont diffusĂ©s sans vie au Johnny Rockets (le Famoso accueille un Ă©vĂ©nement annuel appelĂ© “Good Vibrations Motorsports March Meet”, du nom d’un sponsor de l’entreprise de pièces dĂ©tachĂ©es automobiles). Oui, les anciens sont en partie lĂ pour revivre leur passĂ©. Mais l’énergie principale, parmi ceux qui construisent et pilotent des machines dangereuses et archaĂŻques, est une vitalitĂ© fĂ©roce. Certains grands pilotes de la NHRA sont des convertis, qui ont trouvĂ© le monde de la nostalgie plus attrayant…
Mais surtout plus personnel, plus excentrique, plus Ĺ“cumĂ©nique et plus voyant, et, Ă bien des Ă©gards plus terrifiant et plus brut. J’ai, dans ce fourbi, rencontrĂ© l’aumĂ´nier d’un ministère appelĂ© “Racers for Christ” (RFC), se dĂ©plaçant de dragster en dragster pour prier avec les pilotes avant leur course. Un joyeux d’environ soixante-quinze ans comme moi, Ă la posture ramassĂ©e et Ă la moustache grise, qui visite les pilotes blessĂ©s Ă l’hĂ´pital et cĂ©lèbre les funĂ©railles des coureurs et de leurs familles si nĂ©cessaire. Je lui ai demandĂ© s’il avait dĂ©jĂ trouvĂ© la prière difficile. Il m’a rĂ©pondu que lorsqu’on ne sait pas quoi dire Ă Dieu, il se rappelle qu’il nous a créés et qu’une forme Ă©levĂ©e de communication passe par lui pour s’adresser Ă lui. “Il suffit de laisser couler la prière”, m’a-t-il dit ; “il se peut que vous ne l’entendiez mĂŞme pas”… Je suis sĂ»r qu’il aurait pu m’expliquer un peu plus comment cela fonctionne s’il n’avait pas dĂ» s’excuser brusquement pour aller se prĂ©parer Ă sa propre course. L’aumĂ´nier prĂ©nommĂ© Jay, courait dans la catĂ©gorie des “Gasser”, des voitures classiques dotĂ©es d’un avant surĂ©levĂ©, ce qui leur donne une allure mĂ©chante et excitante. La sienne Ă©tait un coupĂ© des annĂ©es 30 jaune d’œuf, avec des lettres gĂ©antes peintes sur les deux cĂ´tĂ©s. Il a gagnĂ© sa manche et a pratiquement Ă©mis une phosphorescence lorsqu’il m’en a parlĂ© par la suite. Entendre l’aumĂ´nier Jay raconter sa victoire m’a fait l’effet d’une bombe, comme si un deuxième homme Ă©tait apparu. Pas un aumĂ´nier, mais un vainqueur.
Un gars avec qui il fait la course l’avait alignĂ© exactement comme il le fallait, afin d’éviter les traĂ®tres zones dĂ©garnies dans son couloir : “J’étais droit comme une flèche ! Mon concurrent a cassé”, c’est-Ă -dire qu’il est allĂ© trop vite. Les coureurs des catĂ©gories “sportsman” sont opposĂ©s, par tranches, Ă des concurrents ayant le mĂŞme temps d’arrivĂ©e, c’est-Ă - dire l’intervalle estimĂ© entre le moment oĂą la voiture atteint la ligne d’arrivĂ©e. L’objectif est de courir le plus près possible du temps de rĂ©fĂ©rence. (Les courses d’endurance, qui dĂ©truisent le mythe selon lequel les courses de dragsters consistent simplement Ă aller vite, justifient un plan techniquement calĂ© : si vous allez trop vite, vous perdez)… Dans ce cas, le temps de rĂ©fĂ©rence Ă©tait de 9,0 secondes. L’aumĂ´nier Jay a rĂ©alisĂ© un temps de 9,002. Sa vitesse de pointe Ă©tait de 146 miles par heure. “C’est la meilleure passe de tout le week-end”, m’a-t-il dĂ©clarĂ©, rayonnant. Il a Ă©crasĂ© son concurrent. Non pas avec l’aide de Dieu, mais avec de la stratĂ©gie, de l’habiletĂ© et de la chance. Ă€ l’Eagle Field Drags, près de Fresno, il m’a dit avoir rencontrĂ© un pilote nommĂ© Greg Adams. “Ce qu’il y a de bien avec les courses de dragsters, c’est qu’elles m’amènent Ă m’intĂ©resser aux gens”… L’équipe de Greg portait des T-shirts orange vif assortis sur lesquels ils avaient fraĂ®chement peint des inscriptions au pochoir Ă la bombe noire, en hommage au père de Greg, dĂ©cĂ©dĂ©, qui avait lui aussi participĂ© Ă des courses de dragsters.
L’annĂ©e prĂ©cĂ©dente, ils avaient organisĂ© son service commĂ©moratif Ă Eagle Field : “Nous avons dispersĂ© ses cendres dans la prĂ©paration que nous avons mise en place au dĂ©part, pour l’adhĂ©rence des pneus”… Chaque pilote “fume les pneus” au dĂ©part, pour les rĂ©chauffer, les rendre collants et les dĂ©barrasser de toute trace de gravillons. Il a roulĂ© sur les cendres de son père et a fait son burnout, en incrustant son père dans la piste avant de faire sa course. La piste d’Eagle Field n’est jamais raclĂ©e. La gomme brĂ»lĂ©e s’accumule, comme une poĂŞle en fonte qui acquiert des couches carbonisĂ©es d’assaisonnement. “Ces cendres resteront probablement lĂ pour toujours” m’a-t-il dit…. Sur les pistes de dragster, 80% des gens portent des casquettes rouge “Trump”, il est mĂŞme possible d’acheter des serviette de plage Ă l’effigie de Trump et de Poutine, ensemble… Les Hot Rodders dĂ©testent “cet enfoirĂ© de Zelinsky” et prient pour qu’il crève dans les pires souffrances abominables de l’enfer. Waouuuuu ! Dans de nombreux pays, la modification de voitures homologuĂ©es avec des pièces de performance est strictement rĂ©glementĂ©e. Les lois amĂ©ricaines sont plus permissives en ce qui concerne le Hot Rodding, la Californie est l’un des États les plus libres, car elle n’exige aucune inspection de sĂ©curitĂ© pour les vĂ©hicules de loisirs et tourisme et aucune inspection de smog pour les voitures antĂ©rieures Ă 1975. Si vous installez un Hemi avec un Blower Supercharger, le “California Department of Motor Vehicles” n’en dira rien.
Si un policier vous arrête, c’est pour admirer votre installation. Même si les racines du Hot-Rodding sont profondément anti-establishment et anti-flics, ils sont réputés pour ne pas verbaliser les conducteurs de véhicules modifiés. Je savais à quoi m’attendre, et pourtant un dragster Top Fuel chauffant ses pneus a été une violente secousse pour mes sens, même avec des protections auditives. Le burnout exige une montée en régime soudaine et à haut régime, et cela me prend toujours par surprise. Chaque machine est entourée d’une équipe en uniforme assorti qui a tendance à être bien organisée et au moins semi-sponsorisée. L’une des plus grandes équipes de funny-car à Beech Bend, qui préparait la voiture “Problem Child” d’Eddie Knox, comprenait une jeune femme qui retirait les soupapes d’une culasse. Elle les a enlevées, méthodiquement et soigneusement, une par une, puis a fait une pause et s’est approchée d’un bébé dans une chaise gonflable près de l’équipe des stands. J’avais remarqué le bébé plus tôt, mais je n’avais pas réalisé qu’il appartenait à la mécanicienne jusqu’à ce qu’elle le prenne dans ses bras, change sa couche et poursuive son travail. Elle était affectée à l’embrayage et à la partie inférieure du moteur : le travail le plus difficile d’un équipage. Originaire d’une ville de 750 habitants où elle vit avec sa famille dans un cul-de-sac rural, elle était calme, belle, modeste et… légère. Elle a commencé à travailler sur des Dragsters et des Hot Rods avec son grand-père. Elle a commencé à conduire à l’âge de six ans.
Avec son grand-père, elle faisait du Hot Rodding. J’ai senti au fond de ma poitrine, une sorte d’impact comme si quelque chose frappait mon cĹ“ur, c’est excitant quand on y prend goĂ»t. Une forme platonicienne s’est installĂ©e dans mon esprit : une femme debout devant un dragster en phase de prĂ©paration, les jambes lĂ©gèrement Ă©cartĂ©es, les bras levĂ©s pour le positionner en vue du dĂ©collage, ses cuisses formant une sorte d’étincelle formelle, Ă©cho des spectaculaires “slicks” arrière. Pffffffffff ! Au dĂ©but et au milieu des annĂ©es 70, la plus emblĂ©matique de ce type de femmes Ă©tait “Jungle Pam”, qui s’alignait sur la voiture de “Jungle Jim” en short court, ses gros seins dĂ©bordant d’un dos nu, avec une allure plus hippie que Hooters. Ă€ l’époque, Shirley Muldowney et une poignĂ©e d’autres pilotes Ă©taient les seules femmes dans un sport d’hommes. Aujourd’hui, les femmes rivalisent avec les hommes, tant dans la NHRA que dans les courses nostalgiques. MĂŞme si certaines reprennent leur propre version de la routine de “Jungle Pam”, alignant théâtralement les voitures pour le dĂ©part dans des vĂŞtements moulants et des bottes de go-go… On voit aussi des femmes qui se battent pour la survie de leur entreprise. Une grande partie du monde ne peut ĂŞtre tenue ou touchĂ©e, n’exigeant aucun raffinement de nos sens. Un Ă©cran tactile, par exemple, n’implique aucun contact rĂ©el. Sur les iPhones, nous utilisons nos doigts pour appuyer sur des boutons invisibles qui envoient des signaux.
Le dĂ©clenchement de ces boutons ne nĂ©cessite aucune nuance ou modulation. La surface en verre ne donne qu’un retour d’information simulĂ©. Leur fonction supposĂ©e comme intĂ©grer les achats, les informations, le divertissement et la communication ne semble pas avoir Ă©tĂ© comprises, demandĂ©es, ou voulues. Ce n’est pas tant un tĂ©lĂ©phone qu’une distraction addictive. Nous savons qu’il s’agit d’une distraction, mais il est plus difficile d’admettre de quoi il s’agit, car la rĂ©ponse est tout. La plupart des biens de consommation accessibles sur les Ă©crans sont des choses que nous achetons mais que nous ne possĂ©dons pas, un service de streaming, un logiciel “sous licence”, un service de covoiturage. Et parmi les objets que nous possĂ©dons, la plupart sont conçus pour ĂŞtre jetĂ©s lorsqu’ils se cassent. La technologie moderne n’est pas faite pour ĂŞtre dĂ©montĂ©e, fixĂ©e, rĂ©parĂ©e. Nous avons Ă©tĂ© dĂ©qualifiĂ©s, de manière presque invisible, comme si cela s’était produit sans notre consentement. Des machines qui sont dĂ©montĂ©es, Ă©tudiĂ©es, apprises, rĂ©parĂ©es et, plus important encore, modifiĂ©es pour un nouvel usage, c’est l’essence mĂŞme du Hot-Rodding. C’est le contraire de la consommation passive, du leasing, de la licence, de la location, de l’abonnement. Une marchandise, par dĂ©finition, est une chose qui est utilisĂ©e, qui n’obĂ©it pas Ă sa logique interne. Utiliser une marchandise n’est pas la possĂ©der. La possession exige la maĂ®trise…
Si les Hot-Rodders ne font pas partie de l’élite des classes possĂ©dantes, ils ont rompu avec une forme de consommation passive que la plupart des membres de notre sociĂ©tĂ© considèrent comme allant de soi. Ils possèdent une richesse que d’autres n’ont pas. Ils possèdent la connaissance et la maĂ®trise, ainsi que la joie et la justesse qui en dĂ©coulent. Ces choses : la joie, la maĂ®trise, ne s’achètent pas. VoilĂ , j’arrive au bout de cet article, le soleil est bas, embaumant l’air enfumĂ© d’une lueur jaune-orange cuite, j’écoute “Gimme Shelter” et Mick Jagger… DĂ©boulant du fond de l’horizon, arrive avec furie un Hot Rod crachant des flammes, dans un bruit apocalyptique comme seule l’éruption d’un volcan peut provoquer, tout cela au milieu de clameurs, de bruits, de cris… Une beautĂ© suave, genre sauvageonne, en sort, Ă©ructant des insanitĂ©s au milieu de la tempĂŞte qu’elle a provoquĂ©e. Sa coiffure rousse-pute tirebouchonne, son rimmel, son vert Ă z’œils, son ocre Ă pommettes, son rose Ă joues, son violet Ă lèvres dĂ©goulinent comme sur un masque de cire en train de fondre. Ahhhhhhh ! Ce qu’il me faut assister dans cette vie. J’hurle, sĂ©pare, soustrais les plus faibles aux griffes des plus forts, calme de la voix, exhorte, dis les vertus de la civilisation, questionne sur les causes du conflit, remĂ©die de toutes mes forces physiques, mobilise toutes les morales, fais acte ! Et un tant-bien-que-mal de calme s’établit. Chacun haletant pour soi, se rajustant, s’épongeant, maugrĂ©ant des commentaires incomprĂ©hensibles enrobĂ©s de borborygmes….









































