1997 McLaren F1 #062 Le sanctuaire roulant /23.000.000$
Pourquoi 23.000.000 ? Et pourquoi pas moins ? Et pourquoi pas plus ? Et pourquoi pas beaucoup plus ? Quoique la vraie grande et seule question est : “Pourquoi jeter 23 millions de $ plus frais et taxes et emmerdes pour acquérir cette bêtise ?”… D’autant que Sotheby’s, en charge de la vente aux enchères, précise que la valeur réelle estimée et estimable est supérieure aux 23 millions de $ annoncés… Sans limite ? Comme justification est indiqué sournoisement que la bête qui n’a eu que seulement trois propriétaires et affiche 6.500 miles d’origine, avait été achetée neuve par Larry Ellison… La belle affaire !
C’est un résident fortuné de la région de la baie de San Francisco, qui a ensuite payé de nombreuses mises à niveau de post-production chez “McLaren Special Operations”, notamment une climatisation améliorée, des radiateurs, un échappement sport et un réservoir de carburant en aluminium, des achats commandés pour pallier à l’inconfort primitif de cette bête de foire faisant partie des sept McLaren F1 exportées aux États-Unis lorsqu’elles étaient neuves, via Ameritech. Elle n’a jamais été entretenue (alors que toutes les maîtresses le sont) sauf par McLaren Philadelphia en 2024, pour être prête à vendre…
A vendre et à conduire en attente de cette “liquidation”, une utilisation parcimonieuse en dehors de 99% de son temps de vie qui est d’être enfermée dans un garage… J’aime les romans et films d’horreur ou une belle et sexuelle beauté, farouche, est enfermée dans un donjon BDSM pour y subir les pires tourments… Notez qu’il y a eu pire avec Kim Wall, une journaliste invitée pour une balade en sous-marin qui a subi les pires atrocités sexuelles, imaginables…(A lire ICi)… Notez que le lien avec cette McLaren de plus de 23 millions de $ est un cheminement à la fois complexe et d’évidence dans l’anormalité relative…
D’abord parce que cette McLaren n’en est une que de nom, “LE” fameux Bruce McLaren n’y est plus pour quoi que ce soit… L’affaire débute lorsque Bruce McLaren décide de fabriquer une voiture d’endurance à la fin des années 1960. Pour répondre à la réglementation de l’époque, au moins cinquante voitures devaient être construites. Cependant, des problèmes d’homologation ont conduit à l’abandon du projet. Ayant toujours nourri l’ambition de construire sa propre voiture de route, Bruce McLaren voulait transformer son projet en voiture de route la plus rapide au monde.
10 ans à tourner en rond plus tard, au début des années 1970, les travaux ont commencé avec le designer en chef Gordon Coppuck, ce qui permet à Bruce McLaren de développer un prototype, avec l’objectif de produire jusqu’à 250 voitures par an. Finalement, seulement deux “McLaren” M6GT ont été construites, dont le prototype original OBH 500H qui est devenu le véhicule personnel de Bruce jusqu’à sa mort prématurée à Goodwood le . Son projet de voiture de route n’aura duré que quelques mois et Bruce McLaren est mort avec lui.
Presque 20 ans plus tard, en 1989, Ron Dennis crée “McLaren” Cars et sort la McLaren F1… 14 ans encore plus tard, en 2003, soit 34 ans après le décès de Bruce, la société “McLaren Cars” prend le nom de “McLaren Automotive” ! Quel est le lien juridique entre Bruce McLaren décédé en juin’70 et “McLarenCars” et “McLaren Automotive” ? Le nom a été disséqué, empaillé, exposé dans un showroom, puis recyclé comme un vieux slogan publicitaire. Ron Dennis n’a pas ressuscité un rêve : il a exhumé une légende, exploité un cadavre juridique, l’a passée au scanner fiscal, le transformant en produit de luxe pour milliardaires.
Une clique de vieux trop jeunes pour avoir connu l’époque où McLaren signifiait sueur, vitesse et risque de mort à chaque virage. Le nom “McLaren” est devenu une marque déposée, propriété du “McLaren Group”. Ce n’est pas un héritage spirituel. Ce n’est pas une continuité mécanique. C’est juste un droit d’exploitation, comme on exploite un gisement de pétrole sous une réserve naturelle, ou un souvenir sous une tombe pas fraîche. Et comme tout bon capitaliste éclairé, Dennis l’a utilisé pour vendre des voitures à des nostalgiques d’un passé qu’ils n’ont jamais vécu.
Qu’est vraiment la McLaren F1 de cet article ? Ce n’est qu’une créature sans père, une chimère en fibre de carbone, une création juridique née d’un brainstorming dans un salon d’aéroport. Elle n’a jamais été rêvée par Bruce McLaren. Elle est le produit d’un alignement d’intérêts, pas d’une passion mécanique. Elle est destinée à être enfermée dans un garage, comme Kim Wall dans un sous-marin pour être violée et torturée. La comparaison est brutale, mais elle est juste : le luxe moderne enferme ses icônes, les maquille, les fétichise, et les vend comme des fantasmes sous cellophane.
Et Ron Dennis ? Il n’a pas volé le nom. Il l’a déposé, exploité, monétisé. Comme on dépose un brevet sur une molécule de bonheur. Comme on vend du silence dans une boîte noire. Comme on vend des souvenirs d’enfance dans des NFT. Conclusion ? Cette voiture n’est pas une McLaren. C’est une McLaren™, avec le petit “TM” qui dit tout : Ceci est une marque. Ceci est une fiction. Ceci est une marchandise. Un totem vidé de sens, utilisé pour légitimer une industrie du luxe cannibale, qui enferme ses créations comme on enferme des beautés dans des donjons BDSM, prêtes à être contemplées, jamais libérées…
Le nom “McLaren” est devenu un symbole creux, une incantation marketing, une prière sans dieu. Et cette F1 à 23 millions $ n’est qu’une icône parfaite d’un monde qui vend des fantômes, qui achète du prestige comme on achète du silence, et qui confond la mémoire avec le branding… Sotheby’s va fulminer que ce texte est irrésistiblement dérangeant, même si entre Monterey/Californie/USA et Saint-Tropez/Var/France, je n’y fais pas que raconter une “bagnole” en vente aux enchères privées, car je démonte le mécanisme du prestige, découpant le storytelling de l’élite à la scie circulaire…
Pis encore, j’expose les viscères du luxe comme dans une salle d’autopsie : “Mesdames et Messieurs milliardaires triés sur le volet, bienvenue, voici la 53e McLaren F1 produite. L’une des sept exportées neuves aux États-Unis par Ameritech. Livrée à Larry Ellison en 1997, arborant la plaque “ORACLE8”, elle n’a jamais quitté la baie de San Francisco. Trois propriétaires. Moins de 6.500 miles. C’est une voiture qui n’a jamais vraiment vécu, mais qui a toujours été soignée. Son histoire n’est qu’un chapelet de détails techniques : Radiateurs remplacés. Climatisation améliorée. Échappement rendus sportif”...
Réservoirs en aluminium. Pare-brise “authentique” sourcé chez McLaren UK. Transmission reconstruite. Bougies neuves. Batterie changée. Feuille d’or réparée. Chaque intervention est une prière mécanique, chaque facture une page d’évangile. Son dossier ? Un reliquaire. Factures, documents, certificats, jusqu’à la facture originelle d’Ameritech à Ellison. Tout est là. Tout est conservé. Comme si la mémoire pouvait être achetée, archivée, sanctifiée. Et pourtant… Cette voiture n’a jamais été fédéralisée. Elle est restée légale en Californie par une faille réglementaire, une exception miraculeuse…
Elle n’a jamais été repeinte, regarnie, accidentée. Elle est pure, mais immobile comme un sanctuaire roulant conçu pour la route mais condamné au garage. Conclusion ? Le châssis 062 est l’illustration parfaite du luxe contemporain, c’est un objet de culte, entretenu comme une relique, vendu comme un mythe. Son prix n’est pas celui de la performance. C’est le prix du silence, le prix de l’immobilité, le prix d’une mémoire simulée. Épitaphe pour une icône sous cellophane, le châssis 062 est même accompagné de tout ce que l’on peut imaginer pour parvenir à surfaire la valeur des choses…
Et quelles choses ? Les manuels d’origine, le set de bagages d’origine, le rouleau d’outils d’origine, une valise de voyage d’origine, un sac à vêtements d’époque (un gag !), une housse de voiture non certifiée, un kit d’esthétique Auto Glym de super-marché, un modem de service Ford, un ordinateur portable de récupération, une clé dynamométrique de grande surface… Et bien sûr, les anciens radiateurs, réservoirs, les anciennes bougies, la batterie d’origine a demi fondue, le pare-brise cassé, la feuille d’or réparée.
Chaque élément est là, comme les reliques d’un saint, soigneusement conservées, étiquetées, prêtes à être vénérées. Mais ce n’est pas une voiture. C’est un autel roulant, un sanctuaire de fibre de carbone, un fétiche de milliardaire. Elle n’a jamais été fédéralisée. Elle n’a jamais quitté la baie de San Francisco. Elle n’a jamais été repeinte, regarnie, accidentée. Elle a été touchée uniquement par des techniciens certifiés, comme une vierge par des prêtres gantés. Et pourtant, elle vaut 23 millions.
Ce n’est pas pour ce qu’elle a vécu car c’est du non-vécu, mais pour ce qu’elle n’a jamais osé vivre. Et si vous aviez pu bien écouter, dans le silence de son garage climatisé, vous auriez peut-être entendu ce qu’elle ne dira jamais, un murmure spectral dans l’écho d’un tombeau : “Je suis née pour courir, mais on m’a vendue pour me baiser”… Tout est ainsi écrit prêt à l’emploi, un scénario digne d’un roman d’horreur dont on pourrait extrapoler un film Gore ou le Commandant du sous-marin tombeau de Kim Walke, jamais inquiété par la police, circule dans cette McLaren à la recherche de chairs fraîches… Brrrrrrr ! 

















